Le tissage est nouage
Semaine pluri-disciplinaire pour Trigorioù par un échange avec Patrick Guerrier de l’association Les Tisserins ( ).
Patrick est ethno-tisserand et explore l’univers du tissage dans toutes les cultures du Monde. Et c’est un univers de techniques et de savoir-faire incommensurable, qui va des matières sources, de leur transformation en fils, en passant par les procédés de teinture — essentiellement végétales — aux outils pour carder, filer, tisser, avec autant de métiers aux formes et procédés qu’il y a de cultures et de peuples dans le monde. Et bien sûr, il y a les techniques et pratiques du tissage en lui-même, les dimensions expressives, symboliques, narratives, esthétiques, traditionnelles et modernes propres à chaque groupe ethnique.
De nouveau de passage à Saint Malo c’est la culture celtique qui a été investie.
Ainsi, sur la base d’un nouage très connu des marins, le nœud de Carrick, notre aventurier tisserand est allé chercher un « pattern » ancestral retrouvé par des archéologues en Irlande.
Le tissage en motif de ce nœud d’ajut pour le marin offre au mateloteur une autre dimension que la seule fonctionnalité du nouage.
Imaginez que les deux brins qui composent le carrick soient des dragons qui s’entrelacent…
Tout un monde fantastique s’ouvre à vous et le nouage figuré, tissé, vous emmène dans le temps des légendes, dans le temps mythologique, il suffit de suivre le fil qu’il soit de chaine, de trame ou du temps.
Je ne regarderai plus un carrick de la même manière…
Les historiens, les ethnologues, les mathématiciens, les ingénieurs (tels un Jacquard) et les noueurs de toutes espèces, tisserands, mateloteurs et autres, se retrouvent dans l’univers du nouage sur des principes fondamentaux de croisements dessus-dessous (pour faire simple…). Là où un tisserand va déployer son art sur une multitude de fils, le mateloteur va chercher la complexité et l’efficacité en partant d’un seul brin (ou « bout' » pour causer jargon nautique) commis donc fait de torons et de fils dits de caret.
On en revient toujours au fil.
Ainsi, le fil rouge de l’histoire des civilisations c’est l’art du nouage et l’épopée du textile.
Textile du latin textilis, de texere « tisser ».
Le textile c’est donc ce qui est susceptible d’être divisé en fils qui peuvent être tissés.
Là où le nouage commet, épisse, entrelace et tourne un faisceau de fils.
Au fil de l’eau,
d’un fil beau
Marin est mon jardin
Où se créent des liens
Autant de fleurs nouées
à fleur d’eau tissées.